Les ouvriers européens, une réponse à la pénurie de main-d’œuvre
Spécialiste du détachement polonais et roumain, Radosław Gałka a fondé EU Workers, une agence de travail temporaire dédiée au recrutement d’ouvriers qualifiés venant principalement de Pologne et Roumanie. Il nous parle des enjeux de ce secteur.
Qu’est-ce qui vous a amené à créer EU Workers ?
J’ai créé EU Workers suite à plus de 15 ans d’expérience sur le détachement polonais et roumain en France. En 2020, j’ai décidé de regrouper mon activité dans une structure en France, qui était mon marché principal. Cela nous permet de proposer notre service de façon plus pérenne et facile qu’avec un mode détachement, qui a longtemps souffert d’une mauvaise image. Nos clients ont plus confiance. Nous avons donc créé une agence de travail temporaire à Lyon, et malgré la pandémie, nous avons connu une croissance rapide.
Notre prestation principale est la mise à disposition d’ouvriers qualifiés dans trois secteurs où ils sont très recherchés : l’industrie générale, le bâtiment et le tourisme. Forts de notre expérience et de notre base de données, nous sommes toujours capables d’assurer un recrutement.
La main-d’œuvre étrangère est-elle une solution face aux pénuries dans certains métiers ?
En dehors des grandes agglomérations françaises, beaucoup de PME ne peuvent plus prendre de nouvelles commandes car ils ne trouvent pas le staff nécessaire. Notre solution est dédiée à toutes ces PME, où qu’elles soient basées en France car nous travaillons de manière quasiment virtuelle. C’est notre avantage par rapport au concept traditionnel de l’intérim français, basé sur la proximité. Cette mobilité totale, c’est notre héritage du détachement, car nos ouvriers polonais ou roumains viennent travailler en France temporairement, donc la ville a peu d’importance.
Comment ce marché a-t-il évolué dans les dernières années ?
La source de recrutement de compagnons polonais ou roumains commence à s’épuiser. Cela fait déjà presque 20 ans que la Pologne est entrée en Europe, suivie par la Roumanie 3 ans plus tard, et le niveau de vie des deux pays s’est largement élevé. Un maçon qualifié peut désormais avoir un salaire quasiment similaire à la France. Il y a toujours des jeunes qui veulent avoir une première expérience à l’étranger, mais ce n’est plus le phénomène de masse que l’on a pu connaître.
Le nombre de travailleurs compétents ne se renouvelle pas, car dans les pays de l’Est, la formation professionnelle a été abandonnée. Nous avons donc décidé d’ouvrir notre recrutement à des pays hors Union européenne, spécifiquement le Vietnam et le Kenya, en Afrique de l’Est. Nous sommes déjà en train de faire venir des travailleurs vietnamiens en Pologne et en Roumanie, et l’un de nos plus grands clients nous a suivi sur ce processus pour faire venir des soudeurs kenyans.
Nous avons du mal à attirer les jeunes sur ces métiers, qui sont pourtant dans des secteurs cruciaux économiquement. La formation professionnelle est un problème général en Europe. Elle devrait intégrer des nouvelles technologies. Nous avons développé une solution de réalité virtuelle, Dig In Vision, qui permet de vérifier la compétence et d’assurer la formation de base, et qui est bien plus attractive pour les jeunes.